Malik El Djebena a 19 ans et a été condamné à 6 ans de prison. À l'intérieur,
comme à l'extérieur de la prison, il est seul. Il est jeune, trop tendre pour
une incarcération, il ne sait ni lire, ni écrire, pourtant il va devoir subir
cette épreuve. Rapidement, César Luciani le chef des Corses l'oblige à tuer un
homme. Malik n'a pas envie de le faire, mais la pression est trop forte : soit
il exécute les ordres, soit il est exécuté. Grâce à ce geste, Malik parvient à
être sous la protection des Corses qui "dirigent" la prison.
Mais une loi
pour le rapprochement des militants corses détenus est instaurée par le
gouvernement. De nombreux détenus corses vont alors changer de prison, isolant
César Luciani, qui peut malgré tout compter sur la corruption des matons. Cette
situation oblige César à donner plus de responsabilité et de liberté à Malik.
Celui-ci va en profiter pour monter des combines de son côté.
Le prophète
est un donc
un film
sur l'univers carcéral, français. De nombreux films sur ce thème ont été
réalisés ; on se souviendra aussi de l'excellente série produite par HBO : Oz.
Mais la plupart de ces mises en images de la prison sont faites par les
Américains.
Le prophète amène-t-il un regard neuf par rapport à tous ces
films ?
Oui, car pour une fois l'action ne se passe pas aux États-Unis,
mais en France. Bien sûr les codes officieux des prisons apparaissent : chaque
prisonnier intègre un groupe communautaire (ici les Corses et les musulmans),
les nouveaux prisonniers doivent prouver qu'ils sont dignes de
respect.
Oui aussi, car cette spécificité géographique revêt un caractère
politique particulier. En effet, les prisons françaises sont les championnes
d'Europe du nombre de suicides dans les prisons (on est les champions, on est
les champions...). Ce taux de suicide est directement lié aux conditions de vie
dans les prisons : surpopulation, manque de personnels (surveillants,
psychologues, etc.), condition de vie inhumaine (les rats et les matelas par
terre sont encore la réalité de certains détenus). Ça fait une dizaine d'années
que les autorités sont alertées, mais ne bouge pas de façon convaincante. En
espérant que dans les nouvelles prisons que le ministère de la Justice a fait
construire, les moyens seront à la hauteur...
Oui enfin, car ce film
montre du doigt la mission d'une prison censée ramener les voyous et les
criminels dans le droit chemin. Le parcours que prend Malick dans le film n'est
pas celui voulu par le juge qui l'a condamné. L'adage "Prison : école du crime"
correspond bien à sa situation. Avant d'apprendre à lire et à écrire, il apprend
à tuer et à faire du trafic.
Pourquoi continuer à alimenter ces usines à
criminels ? Pourquoi continuer à entasser des individus dans un même lieu qui
reproduisent les actes qui les y ont amenés ? Évidemment, des solutions
alternatives, plus pédagogiques requièrent des moyens et du personnel que le
gouvernement n'est pas prêt à concéder. On ne peut que fantasmer sur de telles
idées.
Pour en revenir plus au film, c'est une belle réussite. Malick est
un Tony Montana, moins bling bling. Un personnage que l'on peut comparer à un
autre film d'Audiard "Un héros très discret" qui racontait l'histoire d'un type
(Mathieu Kassovitz) qui par des quiproquos puis des mensonges est devenu un
symbole de la résistance française.
Voir la bande annonce :