Le conflit au Tibet et son chef le dalaï-lama

En Chine : le gâteau des Rois et... des Empereurs
"En Chine : le gâteau des Rois et... des Empereurs". Caricature parue dans Le Petit Journal en 1898.

Première partie : Chine vs Occident : les raisons du retard Chinois

Le Tibet est une question épineuse dans les relations Occident-Chine depuis l’ »invasion » de la Chine au Tibet lors de l’arrivée des communistes aux pouvoirs avec pour conséquence un génocide culturel. Pourtant, dans cette histoire, tout n’est pas aussi limpide qu’une invasion chinoise massacrant les moines pacifistes tibétains. Reprenons dès le début.

Le Tibet, un territoire chinois

Le Tibet est une province chinoise depuis la dynastie mongole des Yuan (1277-1367) et de celle Mandchoue des Qing (1644-1911). Il y a des divergences quant à la date exacte. Officiellement, la date est arrêtée à 1720, lorsque des administrateurs chinois se sont installés au Tibet. Avançons un peu, jusqu’à l’année 1904, lorsque les Britanniques sont entrés au Tibet. Il y avait une guerre commerciale entre la Russie et les Britanniques. Le Tibet était une région clef puisqu’elle était un des passages d’une des routes de la soie. Cet affrontement a provoqué la fuite du 13e dalaï-lama en Inde. Peu de temps après cet événement, en 1911, la dynastie des Quing disparaît à la suite de la révolution chinoise. Le dalaï-lama en profite pour revenir au Tibet, déclarer l’indépendance et expulser les administrateurs chinois. C’est à partir de cette période que le statut du Tibet fait débat. Les Britanniques qui avaient besoin d’État tampon entre la Russie et la Chine pour conserver une influence dans la région reconnaissent immédiatement l’indépendance.

Pour satisfaire au mieux, les différentes parties, le Tibet, appelé aujourd’hui le Grand Tibet, sera séparé en deux : le Tibet « extérieur », le Tibet d’aujourd’hui et le Tibet « intérieur », comprenant le Kham et l’Amdo ralliés à la Chine. Cette dernière n’a jamais reconnu cette indépendance de fait, mais ayant accumulé les revers, elle ne pouvait se rebeller à nouveau[1]. Jusqu’en 1951 ce statut n’évoluera pas.

Une autre région chinoise, la Mongolie, s’est proclamée indépendante à la même période, une fois de plus non reconnue par la Chine. Mais après la Seconde Guerre mondiale, et voyant l’intérêt que suscitaient les territoires mongols pour les Soviétiques, la Chine demanda la mise en place d’un referendum qui verra le oui l’emporter.

En 1950, quelques mois après l’accession au pouvoir du Parti communiste, l’armée populaire de libération intervient au Tibet et atteint rapidement Lassa, la capitale tibétaine. L’accord en 17 points sur la libération pacifique du Tibet, reconnaissant la souveraineté de la Chine sur le Tibet, est conclu en 1951. Selon des observateurs, il a été signé sous la contrainte. Le gouvernement chinois aurait imposé certaines de ses composantes, rendant donc cet accord caduc. Le point de mésentente principal concernait la présence de militaire du gouvernement chinois au Tibet.

La CIA et l’autoritarisme du dalaï-lama

En plein contexte de guerre froide, l’arrivée des communistes au pouvoir en Chine n’est pas de bon augure pour les États-Unis, d’autant qu’avec la reconquête du Tibet, Mao Zetong se montre hostile envers les intérêts étasuniens. Une opération a donc été diligentée par la CIA pour déstabiliser la politique intérieure chinoise. Ce programme clandestin est évoqué par John Kenneth Knaus, ancien agent instructeur impliqué dans ce programme, dans son livre « Orphans of the Cold War: America and the Tibetan Struggle for Survival  » [2]. En 1956, les premières révoltes de Tibétains contre l’accord en 17 points ont lieux dans les régions du Kham et de l’Amdo et organisées par la CIA. La réponse du pouvoir central fut brutale et a fait de nombreuses victimes. Cette opération a été un échec. En mars 1959, le dalaï-lama sera invité à une représentation théâtrale au sein du siège de l’armée chinoise. Des milliers de Tibétains anticipant un piège vont entourer son palais pour l’empêcher d’y aller. Des émeutes éclatent. Les États-Unis vont alors pousser le dalaï-lama à s’exiler en Inde. Là-bas, il créé le gouvernement tibétain en exil. Pourtant contraire à la charte des Nations Unies, la CIA est intervenue dans cette affaire de politiques intérieure pour déstabiliser le gouvernement d’un pays.

L’autre point noir de ce conflit est le personnage qui dirige la révolte tibétaine, le 14e dalaï-lama, prix Nobel de la paix en 1989. Un reportage de France 24 de janvier 2010 nous montre l’autoritarisme du chef d’une minorité de bouddhistes loins des messages de paix qu’il répète à longueur de temps. Ce documentaire montre un visage plus radical. Il excommunie des moines Shugden, qui serait selon lui du côté chinois : « Les Shugden et les Chinois sont liés, c’est évident, poursuit-il. Les pratiquants shugden sont tous financés par les Chinois ». La journaliste explique que pour la communauté tibétaine, le dalaï-lama a un tel niveau « de clairvoyance et d’éveil » que personne ne remet en question ses paroles.

Journaliste à l’Humanité, Dominique Bari profitait du passage du dalaï-lama en France en août 2008 pour tracer un portrait de l’Homme. Il y rappelait ses relations avec la CIA, qui a financé et entraîné sont mouvement insurrectionnel, mais aussi avec des personnages obscurs comme le gourou de la secte japonaise Aum, Shoko Asahara, auteur de plusieurs attentas meurtriers en Russie et au Japon. Bien sûr, on ne peut pas juger quelqu’un à ces amis, mais ils peuvent aider à mieux cerner le personnage.

En 1991, le gouvernement en exil a mis en place une charte qui dévoile ce que pourrait donner un Tibet autonome avec le retour du dalaï-lama. Cette « Charte des Tibétains en exil ne réintroduit pas le servage en vigueur avant 1956, lorsque le Parti communiste décide d’abolir cette pratique. Cependant, le dalaï-lama jouit de tous les pouvoirs dans ce qui serait une théocratie :

Article 36 : « Tout pouvoir législatif et autorité réside dans l’Assemblée tibétaine. Les décisions de celles-ci requièrent l’approbation de Sa Sainteté le dalaï-lama pour devenir des lois. »

Article 19 « Le pouvoir exécutif de l’administration tibétaine sont dévolus à Sa Sainteté le dalaï-lama, et doit être exercé par lui, soit directement ou par l’intermédiaire d’officiers qui lui sont subordonnés, conformément aux dispositions de la présente Charte. En particulier, Sa Sainteté le dalaï-lama est habilité à exécuter les pouvoirs ci en tant que chef de la direction du peuple tibétain :
(a) approuver et promulguer les projets de loi et des règlements prescrits par l’Assemblée tibétaine ;
(b) promulguer des lois et ordonnances qui ont force de loi ;
(c) conférer les honneurs et les brevets de mérite ;
(d) convoquer, ajourner, reporter et prolonger l’Assemblée tibétaine ;
(e) envoyer des messages et adresses à l’Assemblée tibétaine chaque fois que nécessaire ;
(f) suspendre ou dissoudre l’Assemblée tibétaine ;
(g) dissoudre le Kashag (gouvernement) ou destituer un Kalon (ministre).
(h) décréter l’urgence et convoquer des réunions spéciales de grande importance.
j) autoriser les référendums dans les cas impliquant des grandes questions en suspens conformément à la présente charte
. »

Dans une allocution au Congrès des États unis à Washington le 21 septembre 1987, il revendiquait un État indépendant, duquel les Chinois devaient s’en aller : « le monde doit garder présent à l’esprit que, bien que les Tibétains aient perdu leur liberté, du point de vue du droit international, le Tibet reste aujourd’hui un état indépendant. [...] soumis à une occupation illégale il est impératif que cessent les transferts de populations et que les colons chinois rentrent en Chine. » De quels Chinois parlait-il ? De ceux qui y vivent depuis des siècles ? Depuis ses positions ont quelque peu changé. Par exemple, il ne demande plus l’indépendance, mais l’autonomie. Bien que n’étant jamais revenu sur l’expulsion des Chinois, il martèle que « Notre lutte n’est ni anti-Chine ni anti-Chinoise ».

Une acculturation du Tibet ?

Certains bienfaits depuis la réappropriation du Tibet par la Chine sont indéniables : abolition du servage, augmentation de la durée de vie, nouvelles infrastructures, etc. Cependant, il existe de nombreux points noirs. Le terme de « génocide culturel » est le plus souvent avancé. À leur arrivée, les communistes n’ont pas fait de détails avec la destruction de nombreux monastères. Mais ce fut le cas dans toutes les provinces de la Chine et donc les Tibétains ne sont pas les seuls martyres. La « révolution culturelle » a été subie par toutes les provinces chinoises, mais bien sûr ça ne justifie par pour autant les actes odieux qui ont pu être commis.

Depuis, le gouvernement central semblait faire des efforts et particulièrement dans la diffusion de la langue tibétaine. En danger jusque dans les années 80, elle était enseignée dans 98 % des écoles primaires en 1996. Mais les propos d’un secrétaire du Parti du Qinghai en septembre 2010, ne laissent pas entrevoir d’amélioration bien au contraire : « les dirigeants, à chaque niveau administratif, doivent dissiper leurs propres doutes avec fermeté concernant la priorité donnée à la langue chinoise dans l’enseignement. Si l’on estime crucial que les élèves issus des minorités nationales reçoivent un enseignement dans la langue commune du pays [le mandarin], il faut se défaire de l’idée que cela heurtera leurs sentiments. »

Bien que cette pratique soit écœurante, je m’étonne que la « communauté internationale » s’intéresse aux problèmes de langues de populations si éloignées, alors que sont ignorés les combats menés sur nos territoires pour préserver les langues et coutumes régionales. En effet, le processus de généralisation du mandarin est le même que celui pratiqué par les autorités françaises depuis la révolution de 1789. Dans un rapport de juin1794 rédigé par l’abbé Grégoire, un homme politique, celui-ci déplore que le français ne soit parlé que dans 15 départements sur 83. Même en Nouvelle-France (Canada), ils étaient plus nombreux. Robespierre dans son programme de terreur va rendre obligatoire l’enseignement du français et interdire l’écrit de toutes autres langues. À la fin de la terreur, l’enseignement du Français sera toujours obligatoire…

La Chine autrefois prospère a été ruinée lors des deux guerres d’opium[1]. À la suite de ses revers, son Empire a éclaté. Mais l’arrivée des communistes a permis le renouveau chinois, mais à quel prix ? La contestation était sévèrement réprimée, les cultes religieux ont été interdits, pas seulement chez les Tibétains, mais dans les différentes ethnies que compose le pays. Dans un contexte de guerre froide, ce nouveau foyer communiste devait disparaître aussi vite qu’il était arrivé. Les États-Unis ont amplifié la contestation tibétaine pour faire éclater le pays. Cela n’a pas marché. Aujourd’hui plus personne ne se résout à évoquer un État tibétain. En cas d’indépendance du Grand Tibet qui constitue le quart du territoire chinois, la Chine se disloquerait pouvant faire sombrer avec elle l’économie mondiale. Même le dalaï-lama semble s’être résigné et demande maintenant à avoir une région autonome.

Entre la République populaire de Chine et le dalaï-lama, lequel est le pire ? Beaucoup en occident semblent préférer le dernier, symbole de paix alors qu’il exclu des membres de sa communauté et veut mettre en place un gouvernement autoritaire. Ces liens avec la CIA montrent d’autres intérêts que l’émancipation du peuple tibétain. L’institution américaine a toujours répondu aux intérêts étasuniens et à eux seuls. Pour autant, le gouvernement chinois n’est pas mieux : autoritarisme, censure, restriction des libertés. En connaissance de cause, devons-nous choisir un camp ?

Je conclurais simplement par une citation de Patrick French, démissionnaire en 1999 de la présidence de Free Tibet Campaign :

« Je doute qu’un Tibet libre ait une quelconque signification sans une Chine libre. »[3]

Le Tibet est une question épineuse dans les relations Occident-Chine depuis l’ »invasion » de la Chine au Tibet lors de l’arrivée des communistes aux pouvoirs avec pour conséquence un génocide culturel. Dans cette histoire tout n’est pas aussi limpide qu’une invasion chinoise massacrant les moines pacifistes tibétains. Reprenons dès le début.

Le Tibet, un territoire chinois

Le Tibet est une province chinoise depuis la dynastie mongole des Yuan (1277-1367) et de celle Mandchoue des Qing (1644-1911). Il y a des divergences quant à la date exacte. Officiellement, la date est arrêtée à 1720, lorsque des administrateurs chinois se sont installés au Tibet. Avançons un peu, jusqu’à l’année 1904, lorsque les Britanniques sont entrés au Tibet. Il y avait une guerre commerciale entre la Russie et les Britanniques. Le Tibet était une région clef puisqu’elle était un des passages d’une des routes de la soie. Cet affrontement a provoqué la fuite du 13e dalaï-lama en Inde. Peu de temps après cet évènement, en 1911, la dynastie des Quing disparait à la suite de la révolution chinoise. Le dalaï-lama en profite pour revenir au Tibet, déclarer l’indépendance et expulser les administrateurs chinois. C’est à partir de cette période que le statut du Tibet fait débat. Les Britanniques qui avaient besoin d’État tampon entre la Russie et la Chine pour conserver une influence dans la région reconnaissent immédiatement l’indépendance.

Pour satisfaire au mieux, les différentes parties, le Tibet, appelé aujourd’hui le Grand Tibet, sera séparé en deux : le Tibet « extérieur », le Tibet d’aujourd’hui et le Tibet « intérieur », comprenant le Kham et l’Amdo ralliés à la Chine. Cette dernière n’a jamais reconnu cette indépendance de fait, mais ayant accumulé les revers, elle ne pouvait se rebeller à nouveau[1]. Jusqu’en 1951 ce statut n’évoluera pas.

Une autre région chinoise, la Mongolie, s’est proclamée indépendante à la même période, une fois de plus non reconnue par la Chine. Mais après la Seconde Guerre mondiale, et voyant l’intérêt que suscitaient les territoires mongols pour les Soviétiques, la Chine demanda la mise en place d’un referendum qui verra le oui l’emporter.

En 1950, quelques mois après l’accession au pouvoir du Parti communiste, l’armée populaire de libération intervient au Tibet et atteint rapidement Lassa, la capitale tibétaine. L’accord en 17 points sur la libération pacifique du Tibet, reconnaissant la souveraineté de la Chine sur le Tibet, est conclu en 1951. Selon des observateurs, il a été signé sous la contrainte. Le gouvernement chinois aurait imposé certaines de ses composantes, rendant donc cet accord caduc. Le point de mésentente principal concernait la présence de militaire du gouvernement chinois au Tibet.

La CIA et l’autoritarisme du dalaï-lama

En plein contexte de guerre froide, l’arrivée des communistes au pouvoir en Chine n’est pas de bon augure pour les États-Unis, d’autant qu’avec la reconquête du Tibet, Mao Zetong se montre hostile envers les intérêts étatsuniens. Une opération a donc été diligentée par la CIA pour déstabiliser la politique intérieure chinoise. Ce programme clandestin est évoqué par John Kenneth Knaus, ancien agent instructeur impliqué dans ce programme, dans son livre « Orphans of the Cold War: America and the Tibetan Struggle for Survival  » [2]. En 1956, les premières révoltes de Tibétains contre l’accord en 17 points ont lieux dans les régions du Kham et de l’Amdo et organisées par la CIA. La réponse du pouvoir central fut brutale et a fait de nombreuses victimes. Cette opération a été un échec. En mars 1959, le dalaï-lama sera invité à une représentation théâtrale au sein du siège de l’armée chinoise. Des milliers de Tibétains anticipant un piège vont entourer son palais pour l’empêcher d’y aller. Des émeutes éclatent. Les États-Unis vont alors pousser le dalaï-lama à s’exiler en Inde. Là-bas, il créé le gouvernement tibétain en exil. Pourtant contraire à la chartre des Nations Unies, la CIA est intervenue dans cette affaire de politiques intérieure pour déstabiliser le gouvernement d’un pays.

L’autre point noir de ce conflit est le personnage qui dirige la révolte tibétaine, le 14e dalaï-lama, prix Nobel de la paix en 1989. Un reportage de France 24 de janvier 2010 nous montre l’autoritarisme du chef d’une minorité de bouddhistes loin des messages de paix qu’il répète à longueur de temps. Ce documentaire montre un visage plus radical. Il excommunie des moines Shugden, qui serait selon lui du côté chinois : « Les Shugden et les Chinois sont liés, c’est évident, poursuit-il. Les pratiquants shugden sont tous financés par les Chinois ». La journaliste explique que pour la communauté tibétaine, le dalaï-lama a un tel niveau « de clairvoyance et d’éveil » que personne ne remet en question ses paroles.

Journaliste à l’Humanité, Dominique Bari profitait du passage du dalaï-lama en France en août 2008 pour tracer un portrait de l’Homme. Il y rappelait ses relations avec la CIA, qui a financé et entrainé sont mouvement insurrectionnel, mais aussi avec des personnages obscurs comme le gourou de la secte japonaise Aum, Shoko Asahara, auteur de plusieurs attentas meurtriers en Russie et au Japon. Bien sûr, on ne peut pas juger quelqu’un à ces amis, mais ils peuvent aider à mieux cerner le personnage.

En 1991, le gouvernement en exil a mis en place une charte qui dévoile ce que pourrait donner un Tibet autonome avec le retour du dalaï-lama. Cette « Charte des Tibétains en exil ne réintroduit pas le servage en vigueur avant 1956, lorsque le Parti communiste décide d’abolir cette pratique. Cependant, le dalaï-lama jouit de tous les pouvoirs dans ce qui serait une théocratie :

Article 36 : « Tout pouvoir législatif et autorité réside dans l’Assemblée tibétaine. Les décisions de celles-ci requièrent l’approbation de Sa Sainteté le dalaï-lama pour devenir des lois. »

Article 19 « Le pouvoir exécutif de l’administration tibétaine sont dévolus à Sa Sainteté le dalaï-lama, et doit être exercé par lui, soit directement ou par l’intermédiaire d’officiers qui lui sont subordonnés, conformément aux dispositions de la présente Charte. En particulier, Sa Sainteté le dalaï-lama est habilité à exécuter les pouvoirs ci en tant que chef de la direction du peuple tibétain :
(a) approuver et promulguer les projets de loi et des règlements prescrits par l’Assemblée tibétaine ;
(b) promulguer des lois et ordonnances qui ont force de loi ;
(c) conférer les honneurs et les brevets de mérite ;
(d) convoquer, ajourner, reporter et prolonger l’Assemblée tibétaine ;
(e) envoyer des messages et adresses à l’Assemblée tibétaine chaque fois que nécessaire ;
(f) suspendre ou dissoudre l’Assemblée tibétaine ;
(g) dissoudre le Kashag (gouvernement) ou destituer un Kalon (ministre).
(h) décréter l’urgence et convoquer des réunions spéciales de grande importance.
j) autoriser les référendums dans les cas impliquant des grandes questions en suspens conformément à la présente charte
. »

Dans une allocution au Congrès des États unis à Washington le 21 septembre 1987, il revendiquait un État indépendant, duquel les Chinois devaient s’en aller : « le monde doit garder présent à l’esprit que, bien que les Tibétains aient perdu leur liberté, du point de vue du droit international, le Tibet reste aujourd’hui un état indépendant. [...] soumis à une occupation illégale il est impératif que cessent les transferts de populations et que les colons chinois rentrent en Chine. » De quels Chinois parlait-il ? De ceux qui y vivent depuis des siècles ? Depuis ses positions ont quelque peu changé. Par exemple, il ne demande plus l’indépendance, mais l’autonomie. Bien que n’étant jamais revenu sur l’expulsion des Chinois, il martèle que « Notre lutte n’est ni anti-Chine ni anti-Chinoise ».

Une acculturation du Tibet ?

Certains bienfaits depuis la réappropriation du Tibet par la Chine sont indéniables : abolition du servage, augmentation de la durée de vie, nouvelles infrastructures, etc. Cependant, il existe de nombreux points noirs. Le terme de « génocide culturel » est le plus souvent avancé. À leur arrivée, les communistes n’ont pas fait de détails avec la destruction de nombreux monastères. Mais ce fut le cas dans toutes les provinces de la Chine et donc les Tibétains ne sont pas les seuls martyres. La « révolution culturelle » a été subie par toutes les provinces chinoises, mais bien sûr ça ne justifie par pour autant les actes odieux qui ont pu être commis.

Depuis, le gouvernement central semblait faire des efforts et particulièrement dans la diffusion de la langue tibétaine. En danger jusque dans les années 80, elle était enseignée dans 98 % des écoles primaires en 1996. Mais les propos d’un secrétaire du Parti du Qinghai en septembre 2010, ne laissent pas entrevoir d’amélioration bien au contraire : « les dirigeants, à chaque niveau administratif, doivent dissiper leurs propres doutes avec fermeté concernant la priorité donnée à la langue chinoise dans l’enseignement. Si l’on estime crucial que les élèves issus des minorités nationales reçoivent un enseignement dans la langue commune du pays [le mandarin], il faut se défaire de l’idée que cela heurtera leurs sentiments. »

Bien que cette pratique soit écoeurante, je m’étonne que la « communauté internationnale » s’intéresse aux problèmes de langues de populations si éloignées, alors que sont ignorés les combats menés sur nos territoires pour préserver les langues et coutumes régionales. En effet, le processus de généralisation du mandarin est le même que celui pratiqué par les autorités françaises depuis la révolution de 1789. Dans un rapport de juin1794 rédigé par l’abbé Grégoire, un homme politique, celui-ci déplore que le français ne soit parlé que dans 15 départements sur 83. Même en Nouvelle-France (Canada), ils étaient plus nombreux. Robespierre dans son programme de terreur va rendre obligatoire l’enseignement du français et interdire l’écrit de toutes autres langues. À la fin de la terreur, l’enseignement du Français sera toujours obligatoire…

La Chine autrefois prospère a été ruinée lors des deux guerres d’opium[1]. À la suite de ses revers, son Empire a éclaté. Mais l’arrivée des communistes a permis le renouveau chinois, mais à quel prix ? La contestation était sévèrement réprimée, les cultes religieux ont été interdits, pas seulement chez les Tibétains, mais dans les différentes ethnies que compose le pays. Dans un contexte de guerre froide, ce nouveau foyer communiste devait disparaitre aussi vite qu’il était arrivé. Les États-Unis ont amplifié la contestation tibétaine pour faire éclater le pays. Cela n’a pas marché. Aujourd’hui plus personne ne se résout à évoquer un État tibétain. En cas d’indépendance du Grand Tibet qui constitue le quart du territoire chinois, la Chine se disloquerait pouvant faire sombrer avec elle l’économie mondiale. Même le dalaï-lama semble s’être résigné et demande maintenant à avoir une région autonome.

Entre la République populaire de Chine et le dalaï-lama, lequel est le pire ? Beaucoup en occident semblent préférer le dernier, symbole de paix alors qu’il exclu des membres de sa communauté et veut mettre en place un gouvernement autoritaire. Ces liens avec la CIA montrent d’autres intérêts que l’émancipation du peuple tibétain. L’institution américaine a toujours répondu aux intérêts étatsuniens et à eux seuls. Pour autant, le gouvernement chinois n’est pas mieux : autoritarisme, censure, restriction des libertés. En connaissance de cause, devons-nous choisir un camp ?

Je conclurais simplement par une citation de Patrick French, démissionnaire en 1999 de la présidence de Free Tibet Campaign :

« Je doute qu’un Tibet libre ait une quelconque signification sans une Chine libre. »[3]

  1. Voir l’article précédent Chine vs Occident : les raisons du retard Chinois [] []
  2. Tibet : le soutien ambigu des Etats-Unis au dalaï lama, Pierre Haski, 2007 []
  3. Tibet, Tibet: a personal history of a lost land, Patrick French, 1999 []
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